96 HEURES, de Frédéric Schoendoerffer, 1h26
Avec Gérard Lanvin, Niels Arestrup, Laura Smet, Anne Consigny, Sylvie Testud
Sortie : mercredi 23 avril 2014
Je vote : 3 sur 5
Patron de la Brigade de répression du banditisme, Carra a fait tomber, trois ans plus tôt, un caïd, Kancel. A la faveur d’une extraction montée de toutes pièces par ses complices, Kancel kidnappe le flic. Celui-ci à 96 heures, le temps classique d’une garde à vue, pour lui donner une seule information : le nom de celui qui l’a balancé et lui permettre ainsi de se venger.
3 pistes pour aimer ce polar
Le plaisir de voir le combat de deux grands fauves. De fait, voir l’affrontement dans le huit-clos de cette maison entre Niels Arestrup, un salaud flamboyant qui parle d’une voix feutrée, et Gérard Lanvin, en flic rusé et solide, vaut le détour. Il y a chez ces deux acteurs-là, le plaisir d’économiser le geste, de signifier une émotion par un éclat de voix, un regard planté dans celui des autres qui ne peut qu’emporter l’adhésion. Témoignage de Niels Arestrup : « Ce qui m’intéresse, c’est d’essayer de donner le plus de sang, d’humanité, à tous les personnages que j’interprète. Non pas pour les défendre, ni pour qu’on dise « Il n’est pas si mal, cet homme au fond », mais parce que je veux que la racine de chaque personnage reste en contact avec les gens, que ce ne soit pas un monstre absurde et froid. » Gérard Lanvin note de son côté : « Carré, mon personnage, est toujours en réflexion, en train de penser au coup d’après, tandis que Kancel est toujours dans l’instinct de la situation. Moi, je dois tenir la distance, gagner du temps, et prévoir comment les choses peuvent évoluer. »
Une réalisation classique qui assure. Déjà vieux routier du polar, Frédéric Schoendoerffer sait filmer une atmosphère même si, cette fois, il n’est pas l’auteur d’un scénario qu’il trouvait de son propre aveu, à la lecture, assez banal. Mais l’expérience du huit-clos l’a séduit comme il le souligne : Moi, je sortais d’un film de poursuite, alors ce huit clos entre deux personnages qui seraient forcément incarnés par deux grands comédiens, ça m’a donné envie. » Sans faire courir sa caméra, il parvient à installer un climat original avec tension, choc psychologique et des plages plus douces, ainsi quand Kancel passe à l’anniversaire de son petit-fils où il fait patte et voix de velours pour parler au gamin et à sa mère, jouée par Laura Smet, qui sait ménager une aura de mystère autour de son personnage.
Une maison magnifique. L’autre bonne idée du film, c’est d’avoir choisi cette maison
d’architecte, œuvre de Mallet-Stevens, comme cadre à cet affrontement. « La maison fait 1000 mètres carrés, dit le réalisateur, ce qui est un terrain de jeu idéal pour un huis clos. Cela permet d’être en longues focales, de pouvoir changer souvent de pièces, de ne pas être confiné dans un seul décor, de sentir l’espace autour de soi et de l’utiliser différemment en fonction des séquences. » Un tel cadre permet de rendre encore plus étouffantes les scènes de tension, voire de violence pure, entre Carré et ses ravisseurs ou de faire « respirer » le spectateur. Ainsi dans la belle séquence aérienne où la caméra saisit Kancel en plein réflexion sur la terrasse supérieur de l’édifice.
Sur un thème déjà vu, Frédéric Schoendorffer sait imprimer son rythme et sa griffe pour signer un récit personnel dont le seul défaut tient à l’introduction de l’enquête menée par la collègue de Carré, campée sans véritable conviction par Sylvie Testud. Mais l’ensemble tient sacrément bien la distance…


