TONI SERVILLO DOUBLE LA MISE

L.P-sc 84-211112-077_OKVIVA LA LIBERTÀ, de Roberto Andò- 1h34

Avec Toni Servillo, Valerio Mastrandrea, Valeria Bruni Tedeschi

Sortie : mercredi 5 février 2014

Je vote 3 sur  5

L’histoire ?

Secrétaire général du parti de l’opposition, Enrico Oliveri  est inquiet car  les sondages le donnent perdant. Un soir, il disparaît brusquement laissant une courte note. C’est la panique au sein du parti, tout le monde s’interroge pour essayer de comprendre les raisons de sa fuite pendant que son conseiller Andrea Bottini et sa femme Anna se creusent la tête pour trouver une solution. C’est Anna qui évoque le nom du frère jumeau du secrétaire général, Giovanni Ernani, un philosophe de génie, atteint de dépression bipolaire. Andrea décide de le rencontrer et élabore un plan dangereux…

Et alors ?

Roberto Andò a de la suite dans les idées. La preuve, il a signé le roman et le film du même nom. En jouant sur le thème du double, par le truchement du frère du leader politique que ses camarades de partie utilisent pour combler la soudaine absence d’Enrico, il signe une fable politique ironique sur le pouvoir, la médiatisation et les engagements politiques. « Amour, dissimulation, pouvoir, échec : plusieurs éléments s’entrelacent tout le long du film. Je pense que L.P-sc 46-081112-054tout le monde est concerné. Et qu’on peut y voir aussi une certaine trajectoire suivie par la politique italienne de ces vingt dernières années. Nous sommes en pleine crise d’époque, une crise qui remet en cause tous les principes sur lesquels l’Occident a toujours reposé, une crise qui touche à l’économie et à la politique, et nous sommes tous persuadés que nous allons bientôt atteindre un point de non-retour et que nous devrons tout recommencer à zéro, avec d’autres valeurs, en laissant derrière nous la dissimulation comme forme de gouvernement, ou comme modèle de communication dans le milieu politique » souligne t-il.

Au cœur de l’histoire, il y a l’acteur principal, Toni Servillo qui livre une partition impeccable. Un changement de coiffure, un rien dans la démarche et surtout un éclair dans les yeux, et il passe, sans coup férir, de la peau d’Enrico à celle de Giovanni. D’un personnage un peu gris à un homme non dénué d’humour et qui fait montre d’une liberté de parole totale, ce qui met à distance la langue de bois traditionnelle des politiques. Il est particulièrement étonnant quand il lance son discours à la tribune avec des mines de chat gourmand et un sourire un brin narquois aux lèvres. Le cinéaste note sobrement : « Je n’aurais jamais fait ce film si Toni Servillo avait refusé de prendre part au projet. Je me serais contenté du succès du roman.« 

Roberto Andò réussit son coup en jouant sur les deux tableaux, en brouillant les pistes, de l’Italie à Paris où Enrico se réfugie chez une vieille amie et ancienne amante, campée par Valeria Bruni Tedeschi. Il signe aussi quelques scènes savoureuses comme celle où Giovanni retourne à une fête dans l’asile psychiatrique où il fut interné et se livre à quelques beaux pas de danse sous l’œil éberlué de son conseiller.

Mais, là où l’histoire patine, c’est quand le cinéaste s’ingénie à promener son homme politique en France sans que personne ne le repère, ni simple citoyen, ni journaliste en manque de scoop. A cet instant, le film semble peu vraisemblable tant à l’heure de la médiatisation à tout crin il paraît impossible qu’un leader politique européen puisse se promener incognito sans que jamais personne ne perce le secret de son  identité.

Ce sont les vraies limites d’un film qui sait au demeurant embarquer son monde dans cette réflexion habile sur le pouvoir qui serait l’art de porter un masque.

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