AVEC LES CANDIDATS AU VOYAGE…

photo_hd_01L’ESCALE, de Kaveh Bakhtiari – 1h40

Documentaire

Sortie : mercredi 27 novembre 2013

Je vote : 3 sur 5

Le sujet ?

A Athènes, l’appartement d’Amir, un immigré iranien, est devenu un lieu de transit pour des migrants qui, comme lui, ont fait le choix de quitter leur pays. La Grèce n’est qu’une escale :  tous espèrent rejoindre d’autres pays occidentaux. Ils se retrouvent donc coincés là, chez Amir, dans l’attente de papiers, de contacts et du passeur à qui ils confieront peut-être leur destin…

L’Escale, de Kaveh Bakhtiari

Et alors ?

Le  réalisateur iranien définit ainsi son documentaire :  « C’est un film sur des gens qui essaient de s’extraire de leur condition et d’avoir prise sur leur destin. Dans « L’Escale » , il s’agit de migrants amenés à prendre des risques démesurés précisément là où ils s’y attendent le moins. » C’est le hasard d’une invitation à un festival de cinéma en Grèce qui a conduit  Kaveh Bakhtiari a vouloir retrouver un cousin qui avait tenté sa chance en Europe en prenant le chemin emprunté par bien des migrants et connu la prison grecque. Un tournage clandestin lui-aussi comme le raconte le cinéaste : » Rien n’était et ne pouvait être organisé, car en filmant des clandestins, je suis devenu un cinéaste clandestin. Il fallait être là,  fonctionner à l’instinct et faire semblant d’avoir les nerfs solides : à chaque instant, tout pouvait s’arrêter. Il suffisait que la police débarque et il n’y avait plus rien. Chaque soir, je pensais que je venais de tourner mon dernier plan. »

photo_hd_02Amir (à gauche)  et ses compagnons d’infortune

La force de ce document réside dans la manière de montrer une réalité au quotidien sans forcer le trait : séquences de ces hommes qui rêvent en regardant partir les navires; engueulades quand le moral est au plus bas où partage des activités ménagères… Kaveh Bakhtiari glisse une caméra au plus près du vécu de ces candidats au départ qui vivent une situation inhumaine. Son film est aussi le portrait d’un homme, Amir, qui accueille ces migrants dans son appartement contre une participation aux frais de location de l’appartement et à la nourriture et qui leur offre une parenthèse humaine. Comme il  a une autorisation de séjours lui permettant de décrocher de petits boulots; il est leur bon samaritains. « D’une certaine manière, la particularité d’Amir réside dans sa longue expérience du danger : en aidant les autres, il donne un sens à sa propre vie. Aucun des pensionnaires d’Amir photo_hd_03n’est d’ailleurs reparti comme il était arrivé : en situation de survie, mieux vaut encore essayer de sauver d’autres compagnons de galère qui ne vous oublieront pas. Il faut en effet comprendre que les migrants qui arrivent à Athènes sont des survivants : leur vie n’a pas basculé dans l’anonymat d’une fosse commune comme des milliers d’autres, morts sans escale » raconte le cinéaste.

Par ce doc, il passe derrière la froideur des chiffres pour montrer un des visages de cette  immigration qui n’occupe souvent les médias que lorsque un drame se produit. Sans l’accompagner d’un grand discours ni moralisateur, ni politique. Ce qui rend d’autant plus poignant son regard. Son film est sélectionné  avec deux autres docs pour le Prix du Meilleur documentaire européen qui sera décerné,début décembre, par l’European Film Academy. Une œuvre forte à  découvrir pour sortir de bien des idées reçues.

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