QUAND SISYPHE SE RÉVOLTE, d’Abraham Ségal – 1h30
Documentaire
Sortie : mercredi 20 novembre 2013
Je vote : 3 sur 5
Le thème ?
Quand Sisyphe se révolte est une investigation, tournée en Algérie, en France et en Grèce. Nourri de plusieurs témoignages de proches comme d’universitaires, ce doc va du mythe grec de Sisyphe revu par Albert Camus et ses résonances actuelles à l’appel de l’écrivain pour une juste révolte, qui exclut le meurtre.
Ce qui touche dans ce doc ?
Pour Abraham Ségal, terminer ce film fut une œuvre de longue haleine. Confidences : « Fin 2010, j’ai conçu ce projet autour de Camus et je l’ai présenté en 2011 aux chaînes de télévision françaises. Mais je n’ai pu que constater, une fois de plus, leur frilosité face à un projet d’envergure, non formaté, qui ne se contente pas d’évoquer la vie et l’œuvre d’Albert Camus. Si j’étais prudent et raisonnable, j’aurais peut-être abandonné le projet. Mais je ne le suis pas ! »
En partant de Lourmarin où vit toujours la fille du romancier Catherine Camus jusqu’à la Tunisie actuelle qui tente de vivre sa liberté retrouvée
en passant par la Grèce, terre d’attente pour bien des migrants et où le romancier puisa une part de son inspiration dans la mythologie célèbre, le cinéaste montre bien la modernité de Camus qui s’est battu toute sa vie pour défendre la liberté de l’Homme.
Edgar Morin note fort justement comment l’auteur fut longtemps un compagnon de route des libertaires comme le montre un recueil récent : Ecrits libertaires (1948-1960) (Editions Indigène). Et le philosophe et sociologue de souligner ici : « Et donc c’est un parcours de vie très, très beau. Parce qu’il a été communiste dans sa jeunesse avant-guerre, mais il fait partie de ces quelques-uns qui ont été démystifiés après la guerre d’Espagne, après le pacte germano-soviétique. Et qui ne se sont pas remystifiés une fois que l’URSS est entrée en guerre. Et du point de vue politique, bien qu’il fût totalement indépendant, il apportait son soutien aux libertaires. »
Ce n’est pas étonnant alors de voir comment le moraliste Camus s’est tôt élevé contre la peine de mort et tous les terrorismes aveugles. Robert Badinter ajoute : « Camus restera, dans l’histoire de l’abolition, comme un des esprits phares qui ont éclairé les ténèbres. Les vraies ténèbres de l’esprit humain. Comme Hugo. »
Malgré le ton parfois trop universitaire du commentaire, ce documentaire riche rend hommage à un homme qui n’a eu de cesse que d’éclairer la conscience humaine. Et dont la modernité des propos résonne encore fort dans une société actuelle en plein doute et en pleine crise.
A Lourmarin, Marion Richez en compagnie de Catherine Camus qui dit de son père : « Il m’a donné une force, l’amour de la vie et le respect des autres… Et ça c’est inestimable.«
