Avec La Vénus à la fourrure, le nouveau film de son mari sur les écrans le 13 novembre, Roman Polanski, Emmanuelle Seigner revient en force sur le grand écran après Dans la maison ou encore Quelques heures de printemps. Retour sur le parcours sinueux d’une enfant de la balle.
La Vénus à la fourrure n’est pas la pure adaptation du roman éponyme de Leopold Von Sacher-Masoch mais celle d’une pièce de théâtre de David Ives : il s’agit d’un huis clos entre Thomas (Mathieu Amalric), un metteur en scène désespéré, et Vanda (Emmanuelle Seigner), une comédienne un peu nunuche. Vanda débarque dans un théâtre pour passer une audition et décrocher le rôle dans la pièce montée par Thomas. Cette femme qui surgit devant lui est tout ce que Thomas déteste : la vulgarité et la stupidité. Pourtant, elle révèle un don de comédienne. Dans un décor de western, reste d’une production belge précédente, c’est le début d’une relation sadomasochisme… De ce personnage, la comédienne dit : « On ne sait jamais d’où elle va. Quel est son but, sa finalité. On ne sait pas qui elle est. » De son côté, Roman Polanski souligne dans un entretien bilan du Nouvel Obs : « Le personnage de la femme est très fort et, je pense, plaît au public féminin. D’habitude, mes films sont plutôt destinés aux hommes. »
Pour Mathilde Seigner, ce film est le point d’orgue de son histoire avec Roman Polanski avec lequel elle partage la vie depuis vingt-huit ans et avec lequel elle a déjà tourné à plusieurs reprises. Si elle a senti une complicité immédiate avec lui, elle éprouve aussi une attirance pour les hommes qui sont attaqués. « Je ne peux m’empêcher de défendre celui qui est agressé, l’homme blessé » dit-elle. Il est vrai, avec le parcours personnel du cinéaste, elle a de quoi faire.
Et la sortie de La Vénus à la fourrure est accompagnée d’une nouvelle polémique sur le passé de son homme. Amantha Geimer, qui avait accusé le cinéaste de l’avoir violée quand elle avait 13 ans, vient de sortir en français : La Fille, une vie dans l’ombre de Polanski(Ed. Plon) où elle revient en détail sur cette soirée du 10 mars 1977. Pour autant, cette Américaine joue aujourd’hui l’apaisement. Dans une interview à Elle, elle dit évoquant ce moment dramatique de son existence : « Pourquoi je ne lui pardonnerais pas ? Je ne vais pas être en colère toute ma vie ! Quant à le défendre, tout homme, même lui, a droit à un procès équitable. Or, le juge Rittenband n’a fait qu’essayer de le coincer, parce qu’il était une star de Hollywood, pour son propre bénéfice politique. Il a décidé de changer la peine, alors que nous avions trouvé un accord qui convenait à tout le monde. Dans ces circonstances, je comprends que Roman ait quitté le pays. Il a été traité tellement injustement que je ne comprends pas qu’il n’y ait pas eu d’investigation sur ce juge. »
Mais revenons au cinéma… Pour Emmanuelle Seigner, ce film marque un retour au premier plan d’une comédienne qui, entre le soutien à son mari quand il était emprisonné en Suisse et un détour remarqué par la chanson, avait mis sa carrière entre parenthèses. Il est vrai, alors qu’elle vient d’une dynastie d’acteurs -son grand-père Louis et sa tante, Françoise, étaient sociétaires à la Comédie-Française- elle n’avait, jeune, guère envie de sauter le pas et de se dévouer à ce métier. Ayant d’abord commencé dans le métier de mannequin à 14 ans elle a ensuite été révélée au public par le film Détective, de Jean-Luc Godard. Mais c’est surtout Frantic, thriller parisien de Polanski avec
Harrison Ford qui la rendit célèbre ayant connu un succès international. Une exposition qui lui valut bien des critiques. Un climat qui lui a sans doute appris à endurer les attaques et à se blinder. La chanson fut aussi une autre manière de s’ouvrir de nouveaux horizons. Ainsi, elle est revenu en 2007 sur le devant de la scène grâce à un album rock’n’roll, aux teintes sixties, écrit et composé par le groupe Ultraorange avec lequel elle entame une tournée. « J’ai tellement appris en chantant, dit-elle. Chanter m’offre une liberté que je ne retrouve nulle par ailleurs. »
Pour autant, elle n’a jamais délaissé le cinéma sans pour autant occuper aussi régulièrement l’affiche que sa sœur Mathilde. Du Scaphandre et le Papillon, déjà avec Mathieu Amalric, où elle jouait l’ex-femme de Jean-Dominique Bauby, ancien rédacteur en chef du magazine Elle, victime du syndrome d’enfermement, à Place Vendôme, de Nicolas Garcia et Backstage, d’Emmanuelle Bercot, deux réalisatrices qui ont compté pour elle.
Au final, Emmanuelle Seigner est une actrice qui se joue des clans et des vogues. Elle avoue même qu’elle « détesterait » être une actrice à la mode. Pour l’instant, elle a réussi son pari et a les moyens de le tenir…
