L’AUTRE VISAGE DE LA CORSE

LES APACHES, de Thierry de Peretti – 1h22

Avec Aziz El Haddachi, François-Joseph Culioli, Hamza Meziani, Joseph-Marie Ebrard

Sortie : mercredi 14 août 2013

Je vote : 3 sur 5

Les 5 AFFICHEQuezako ?

Pendant que des milliers de touristes débarquent en Corse, cinq adolescents de Porto-Vecchio trainent. Un soir, l’un d’eux conduit les quatre autres dans une luxueuse villa inoccupée dont son père assure l’entretien… La bande y passe clandestinement la nuit. Avant de partir, ils volent quelques objets sans valeur et deux fusils de collection. Quand la propriétaire de la maison débarque de Paris, elle se plaint du cambriolage à un petit caïd local de sa connaissance…

Et alors ?


Connu pour son parcours d’acteur -avec Chereau dans Ce qui m’aiment prendront le train par exemple- Thierry de Peretti a choisi de situer son premier film dans son île natale mais en sortant des sentiers battus. De fait, en filmant cette bande de jeunes qui occupent une maison luxueuse de vacances, en promenant sa caméra dans les banlieues d’une ville comme Porto Vecchio, il montre un autre visage de l’Île de Beauté. Il raconte : « Je voulais réaliser un film en Corse, pas uniquement parce que je viens de là et que c’est un des endroits que je connais le mieux, mais parce que, bizarrement, c’est un territoire qui n’est pratiquement pas filmé, peu visité par le cinéma et par les autres arts, même si ça commence à changer un peu. Or, pour moi, c’est un terrain de jeu absolument passionnant, une terre pour les récits de cinéma, indéniablement. »

A ce jeu, il décrit bien comment la Corse vit au rythme de la spéculation immobilière, comment toute une jeunesse s’ennuie tout au long de l’année dans une île qui vit au rythme du tourisme et des « envahisseurs » de l’été. Au détour d’un dialogue, un des jeunes corses dit en regardant ce tourisme de masse : « moche, moche, moche ! », formule symbolique pour montrer comment les insulaires se sentent frustrés, presque dépossédés par cette arrivée massive quand, le reste de l’année, l’île vit au ralenti, est presque morne.

Et surtout il nous fait découvrir la vie de cette communauté marocaine importante dans l’île. Le réalisateur poursuit : « Je voulais aussi filmer des jeunes gens issus de la communauté marocaine. C’était un des enjeux de ce projet. Même si le sujet du film ne se situe pas là, deux des AP 1personnages en font quand même partie. Ils sont aussi irréductiblement insulaires que les deux autres. Avant même d’être français peut-être. La communauté marocaine est une de celles qui a le plus souffert en Corse, tant en raison des conditions de travail que les hommes trouvaient en débarquant sur l’île de la fin des années 60 au milieu des années 70, que par le sentiment de rejet dont elle a fait l’objet. Mais les Marocains ont contribué à construire la Corse telle qu’elle est aujourd’hui. Ils appartiennent légitimement à cette île et cette île leur appartient. Comme à tous ceux qui y vivent et y travaillent. Sa jeunesse est pour moi certainement un espoir. »

S’appuyant sur un casting solide de jeunes acteurs, le réalisateur s’est inspiré d’un fait divers pour montrer la réalité de la vie quotidienne sur place. Le meurtre sert alors de révélateur à la description d’une forme de délinquance, née du désœuvrement, alors qu’en coulisses, œuvrent un réseau de petits caïds qui monnayent leur protection. Loin d’une image traditionnelle, de celle du bandit d’honneur, Thierry de Peretti donne donc à voir une Corse moderne. Si le film manque parfois de rythme, comme si une certaine langueur s’abattait aussi sur le scénario, il a le mérite de donner à voir cette réalité quotidienne, peu médiatisée. Un premier opus qui a du style. On attend de voir la suite…

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