L’ATTENTAT, de Ziad Doueiri – 1h45
Avec Ali Sulimna, Reymonde Amsellem, Evgenia Dodina
Sortie : mercredi 29 mai 2013
Je vote : 3 sur 5
L’histoire ?
Dans un restaurant de Tel-Aviv, une femme fait exploser une bombe dissimulée sous sa robe de grossesse. Toute la journée, le docteur Amine Jaafari, israélien d’origine arabe, opère les victimes de l’attentat. Au milieu de la nuit, on le rappelle à l’hôpital pour lui annoncer que la kamikaze est sa propre femme, Siham. Refusant de croire à cette accusation, Amine part en Palestine pour tenter de comprendre…
La description de l’itinéraire de ce chirurgien confronté au pire et qui évite tout sentiment exacerbé. Chez Amine, il y a d’abord le désir de comprendre l’incompréhensible. Déjà au cœur du roman éponyme de Yasmina Khadra, cette absence de révolte est encore amplifiée dans l’adaptation cinématographique. Ziad Doueiri souligne : « Le conflit israélo-palestinien et la colère qu’il suscite sont connus de tous. Je voulais m’éloigner de cette rhétorique de revendication. Dans son livre, Yasmina Khadra tenait cette position, sans jamais céder au moindre slogan politique. Avec Joëlle (Tourna, co-scénariste : NDR) , nous avons suivi le même cap. C’était ardu parce qu’un seul mot peut être interprété, récupéré par l’un des deux camps. Il ne s’agissait pas de montrer le Mal ou la victime ultime : c’est une histoire d’amour où coexistent deux points de vue. » C’est cette finesse du récit qui touche, qui fait réagir et l’on suit avec intérêt le retour en Palestine d’Amine -admirablement bien campé par Ali Suliman- premier chirurgien arabe récompensé par une Académie israélienne et qui découvre soudain, la réalité vécue dans les territoires.
Moins touchant
Comme dans le livre, le film focalise sur le personnage d’Amine qui , de jour en jour, découvre l’autre visage de sa femme, se confronte à l’horreur, et à l’obscurantisme de certains religieux comme aux violences verbales des agents israéliens. Or, mettre en images le désarroi psychologique d’un personnage n’est pas toujours chose facile sur grand écran et le cinéaste ne parvient pas toujours à maintenir la tension nécessaire pour éviter les baisses de rythme, passé une ouverture qui touche au cœur. Les limites d’un film dont le message nuancé est pourtant à entendre et à comprendre…
Un opus qui est déjà objet de polémique dans le Liban du cinéaste qui raconte : « Le gouvernement libanais a une position ambivalente parce que j’ai violé la loi qui interdit à tous ses ressortissants d’être en contact, même de se faire photographier, avec un Israélien. Quel que soit le pays où l’on se trouve. D’un autre côté, les autorités hésitent à se battre contre un artiste, d’autant plus qu’il y a déjà eu plusieurs films censurés au Liban. Ceux qui ont initié cette cabale contre moi n’ont même pas vu le film : ils se sont juste fondés sur le fait que « L’Attentat » a été, en partie, tourné à Tel-Aviv avec quelques acteurs israéliens. Ils invoquent même la peine de mort, ce que le gouvernement n’appliquera jamais. Pour eux, j’ai commis un sacrilège, presque un crime d’État. Je vais rentrer me battre pour que le film sorte au Liban et au Moyen-Orient. On ne peut pas faire porter à un cinéaste tout le poids d’une cause et d’un conflit. Je ne suis le porte-étendard d’aucune lutte. Je suis tombé amoureux du livre de Yasmina Khadra et je me suis donné tous les moyens de raconter cette histoire. » Malgré les réserves évoquées, c’est ce qui pousse quand même à aller voir un tel film audacieux…


