LA DEMORA, de Rodrigo Pià – 1h24
avec Roxana Blanco, Carlos Vallarino
Sortie : mercredi 20 février 2013
Je vote : 4 sur 5
Dans son petit appartement de Montevideo en Uruguay, Maria s’occupe seule de ses trois jeunes enfants et de son père Agustín qui perd peu à peu la mémoire. Elle est dépassée, d’autant plus qu’elle travaille chez elle pour une entreprise textile contre une rétribution médiocre. Quand on refuse à Augustin son entrée en maison de retraite, Maria sombre et tente un acte désespéré…
2 raisons d’aller voir ce film ?
Un thème douloureux universel : le poids des parents âgés et les problèmes de garde. En ne disant pas ostensiblement que l’histoire se passe à Montevideo -que rien ne parvient à identifier dans le film- Rodrigo Pià et sa scénariste Laura Santullo donne d’emblée à ce récit une portée universelle. Cela se passe en Uruguay mais, en 2003, l’été de la canicule a montré comment certains personnes âgées pouvaient être laissées dans leur coin en France même.Rodrigo Pià le souligne : » Nous avons donc décidé de contextualiser le film ici, avec des personnages locaux,
mais pour autant la ville n’est pas vraiment reconnaissable. Nous n’avons pas filmé sur les Ramblas, par exemple. Cela reste en réalité un lieu plutôt neutre et nous aurions pu filmer dans d’autres endroits. Comme en Allemagne, ou en France. »
Une manière de tourner pudique et forte. Par le choix des cadrages et celui du Cinémascope qui permet de cadrer les deux acteurs et de saisir au plus près les émotions, les doutes, le cinéaste nous place au plus près de la vie de famille de Maria. Ainsi, le spectateur est embarqué à sa suite dans cette tranche de vie. Avec, au cœur du récit, la figure de cette femme qui se bat toute la journée avant de craquer un jour. Elle a alors cette phrase qui fait mouche : Je ne suis pas comme ça. » Et pourtant, dans un instant précis de son existence, confrontée à tant de difficultés, elle agit pourtant de façon terrible.
Outre le jeu parfait de la comédienne principale – Roxana
Blanco a obtenu un prix d’interprétation féminine au Festival Biarritz d’Amérique latine- une grande partie de la force du film tient au fait que le cinéaste montre sans porter un jugement. Comme le souligne au passage la scénariste Laura Santullo : « En tant que créateurs, nous avons toujours refusé de juger nos personnages dans nos films. Les personnages qui se trompent sont extrêmement intéressants, surtout quand leur décision revêt une dimension morale. »
Une chose est sûre : l’histoire remue le spectateur et on garde longtemps en mémoire le visage de Maria quand elle part de nuit à la recherche de son père, « oublié » au pied d’un immeuble semblable à bien des HLM moderne.

