REBELLE, de Kim Nguyen – 1h30
avec Rachel Mwanza et Serge Kanyinda
Sortie : mercredi 28 novembre 2012
Je vote : 4 sur 5
Quezako ?
Jeune fille, Komoma raconte à l’enfant qu’elle porte l’histoire de sa vie dans l’armée des guerriers rebelles d’un pays d’Afrique. Le seul qui va l’aider dans cette descente aux enfers est le Magicien, un adolescent albinos de 15 ans, qui veut l’épouser. Ensemble, ils vont fuir les rebelles…
Et alors ?
Indéniablement, on prend cette histoire en pleine gueule. Au-delà de la « simple » histoire de deux enfants soldats, filmée avec un réalisme et une violence qui ne peuvent laisser froid, il y a dans le film de Kim Nguyen, une grande force poétique, un lyrisme certain avec, par exemple, l’évocation des disparus qui reviennent dans la vie des combattants. Ou lorsque les deux enfants débarquent dans le village albinos. Le cinéaste annonce la couleur quand il dit : « Je ne voulais pas faire un film didactique sur les enfants-soldats, mais plutôt un mélange de lyrisme, de magie, de poésie, de violence, une histoire d’amour aussi.»
En mêlant la description de la vie de ces enfants soldats, soumis à la violence des chefs, et une romance, il parvient à donner plus d’épaisseur à ce récit tout en l’humanisant, à mélanger des séquences de grande douceur, où ces enfants semblent retrouver une adolescence normale, à des moments très durs, parfois insoutenables comme le scène où Komoma doit abattre ses parents pour éviter qu’ils soient massacrés à la machette.
Plus étonnant encore, les deux comédiens principaux dont ainsi leurs premiers pas devant une caméra. Pour ce rôle, la jeune Rachel Mwanza a décroché l’Ours d’Argent de la meilleure interprétation féminine à la Berlinale 2012 et le prix de la meilleure actrice au festival du Film de Tribeca : il est vrai, elle est époustouflante à l’image. Tout comme son partenaire albinos. Pour préserver une certaine tension sur le tournage, entièrement conçu en République Démocratique du Congo, mieux immerger les interprètes dans une histoire si dure, Kim Nguyen a fait un choix qu’il raconte ainsi : « Avec ce film, j’avais envie de briser les codes de mes précédents films et de tourner les scènes comme s‘il n’y avait pas d’avant ni d’après, comme si seulement le moment présent était réel. J’ai imposé aux comédiens qu’ils ne lisent pas le scénario avant le tournage, et nous avons tourné le film en continuité temporelle. Ainsi, les comédiens ne savaient jamais ce qui allait arriver à leur personnage le lendemain… Il fallait pour cela une grande confiance de leur part, et c’est à travers ce processus que j’ai découvert le courage des femmes et des hommes congolais, prêts à s’abandonner, à risquer tout pour un projet collectif auquel ils croient. Au fil des jours de tournage, j’ai aussi décidé d’imposer la même spontanéité à l’équipe de tournage à certains moments choisis. »
Il faut sans doute expliquer l’urgence par ce choix, l’urgence que l’on ressent dans bien des séquences comme si la violence pouvait surgir au détour du chemin. Une chose est sûre : on ne peut rester indifférent devant un tel film !
