ISRAËL : L’AMOUR COMME SOLUTION POLITIQUE ?

WOULD YOUR HAVE SEX WITH AN ARAB ?,

de Yolande Zauberman – 1h25

Avec Gideon Levy, Juliano Mer-Khamis

Sortie : mercredi 12 septembre 2012

Je vote :  3 sur 5

L’histoire  ? Un voyage dans la nuit des bars de Tel-Aviv aux ruelles de Jérusalem en passant par les dancing où la fête bat son plein.  Une errance à la rencontre des Juifs et  des Arabes, tous citoyens d’un même pays : Israël. Avec un « détail » : un  Israélien sur cinq est arabe…  Une simple question est posée par surprise. Aux uns: « Would You Have Sex With an Arab? » Aux autres: « Would You Have Sex With An Israeli Jew? »  Une telle interrogation en trouble plus d’un. Masquant souvent une gêne, beaucoup improvise une réponse, se réfugiant parfois derrière le rire. Des réactions à chaud qui en disent long  sur les frontières  qui délimitent l’espace social et mental d’Israël…

Avant-première « Would You Have Sex With An Arab ? »
Deux raisons d’aller voir ce film  ?

Une question banale en forme de révélateur. Mises bout à bout, dans un désordre apparent, les réponses en disent long sur l’état d’esprit des deux côtés de cette frontière invisible en Israël. Ainsi cette jeune femme croisée dans une boite de nuit qui lance : « C’est débandant. J’aurais peur de tomber amoureuse, parce que ça poserait des problèmes après… » Ou  Barman, un Arabe israélien, qui note sans détour:  « c’est presque un crime d’être un couple mixte« . Issu d’une famille libérale, Barman  a vécu sans difficulté avec une Juive… jusqu’à ce que leurs désaccords sur l’histoire du pays ne les séparent. « Elle est devenue une sorte de sioniste extrémiste », tranche-t-il. elle montre bien les résistances à toute évolution de mentalités. Son film marque d’ailleurs la dernière apparition de l’acteur l’acteur juif et palestinien  Juliano Mer-Khamis qui dut assassiné par balles le 4 avril 2011 à Jénine. Un artiste qui lance : « J’aime les seins, pas les Arabes ou les Juifs ! ». Pour autant, on sent que le chemin pour la réconciliation sera long.  La cinéaste avoue d’ailleurs qu’elle n’a pas le sentiment d’avoir fait le tour de la question. « Surtout pas ! J’ai l’impression d’avoir un moment fait baisser la rage, fait perdre le jugement. Et je pourrais continuer : le film veut sortir de la peur, de la généralité, tout en ayant la conviction que chaque personne est universelle. »

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Une révolution qui passe par l’intime. Par le biais de cette question banale, Yolande Zauberman pose la question originale de « la résistance par l’intime« . Elle ajoute : « Comment une révolution peut partir d’un lieu marginal et secret comme le lit des gens… Je crois profondément aux marges comme lieu avant-coureur des transformations d’une société. En Israël, il y a une marge contenue au sein même de la société. Ce sont les 1,5 millions d’Arabes israéliens, ces Palestiniens détenteurs de la nationalité israélienne, très majoritairement musulmans. Ils vont dans les mêmes universités, prennent les mêmes bus et ont peur des mêmes bombes. Ils ont parfois des passeports et connaissent mieux la culture juive ou l’hébreu que beaucoup de juifs européens. Ce sont des exilés de l’intérieur, une communauté qui se sent dans une expérience très particulière, jamais reconnue, pas même par elle-même. Il y a beaucoup de misère sociale dans ce groupe, beaucoup de banditisme et de cas de schizophrénie. Ceux qui s’en sortent sont souvent des individus remarquables, des artistes qui ont trouvé des moyens de raconter la complexité de leur vie. « 

Avec quelques beaux moments de cinéma -comme l’errance nocturne un brin surréaliste de a « Fiancée de Palestine » sur un trottoir de Tel Aviv, célébrée en permanence dans ce documentaire- le film de Yolande Zauberman ouvre un débat qui n’est pas prêt de se refermer et nous force à sortir d’un manichéisme certain. Reste à savoir si un tel film peut faire évoluer les mentalités ? Une chose est sûre : ce sera long et encore douloureux.

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