LE SECRET DE L’ENFANT FOURMI, de Christine François – 1H48
Avec Audrey Dana, Robinson Stevenin, Yann Trégouet et Elie-Lucas Moussoko
Sortie : mercredi 2 mai 2012
Je vote: 3 sur 5
Quezako ?
De retour Bénin pour retrouver son ancien amant qui l’a quittée sans explication, Cécile se perd en se promenant dans la brousse. Elle dort dans sa voiture et, au petit matin, une jeune africaine lui donne son enfant. Adoptant finalement ce bébé, qu’elle nomme Lancelot, Cécile l’emmène en France. L’année de ses 7 ans, elle retourne au Bénin pour faire découvrir à Lancelot s es origines et démêler les raisons de cet abandon.
Cécile et son enfant « donné » au milieu de la savane
Les raisons d’y aller ….
Par son itinéraire – elle a notamment co-réalisé avec Rémi Lainé sur Brigade des mineurs : l’amour en souffrance- Christine François garde une griffe de documentariste qui ressort dans le scénario de son premier long métrage au propos ambitieux. Evoquer l’adoption d’un petit africain sous une forme romancé et avec un arrière-fond de rites et de croyances qui semblent d’un autre temps. Elle souligne : « Cette histoire m’a été inspirée par les confidences d’une femme française qui a adopté un enfant bariba accusé d’être un sorcier dans des circonstances assez proches de celles décrites dans le scénario. Les parents du gamin l’avaient sauvé à l’extrême limite en le jetant dans la voiture d’un prêtre. Ma rencontre avec une femme blanche, Vonick, et son enfant noir a été déterminante. J’ai remonté le fil de cette histoire, je suis allée voir les protagonistes sur place, dans le village de l’enfant, j’ai recueilli d’autres témoignages directs. » C’est sans doute ce qui donne à l’arrivé un scénario dense et qui évite toutes les caricatures.
C’est aussi l’histoire d’une jeune femme paumée dans sa vie sentimentale et l’absence d’un père et dont l’irruption de cet enfant tombé de la brousse va bouleverser l’existence. Christine François reconnaît le côté peu ordinaire de la situation, presque irréaliste : « J’ai volontairement choisi cette situation extrême. Ce que j’appelle « une maternité de hasard », se faire donner un bébé, c’est quand même rare ! » Dans le personnage de Cécile, fragile en apparence mais d’une étonnante force mentale, Audrey Dana nous surprend, trouvant sans doute ici un de ses meilleurs personnages, face à Robinson Stevenin, toujours à l’aise dans les rôles de mâle fragile, peu doué dans la communication des sentiments. Audrey Dana souligne : « Grâce à la rencontre de cet enfant, Cécile atteint une forme de vérité, de sérénité, dans son identité de femme. » Au demeurant, la cinéaste a eu l’astuce de décrire aussi Cécile par ses relations avec d’autres personnages, « secondaires » dans l’histoire : une mère avec qui les rapports sont tendus, un nouvel amant qu’elle tient à garder un brin à distance… Le tout étant filmé avec un style personnel : alternance de séquences calmes, aux couleurs douces, et de moments plus rythmés, avec notamment le stress des ambiances nocturnes; beaux plans qui ne sombrent pas dans la carte postale sur la sombre Afrique…
Cécile (Audrey Dana) et l’étonnant Elie Lucas MoussokoEnfin, le propos doit susciter le débat. Car, au delà de cet exemple africain -et du sacrifice des enfants qui porteraient le mauvais œil- le film pose plus généralement, la question du poids des croyances et de certains rites sur nos vies à une époque où la religion peut servir de prétexte à bien des asservissements. C’est que symbolise la cinéaste, avec le personnage de cette jeune religieuse africaine qui accepte de dévoiler à Cécile l’existence de pratiques ancestrales. Conclusion d’Audrey Dana : « J‘ai envie d’espérer, oserais-je dire, de croire, au pouvoir initiatique de ce film sur le public occidental mais aussi sur le public africain. Que l’on puisse faire un travail de communication en Afrique afin de réveiller les consciences et de protéger au mieux ces enfants. «


