38 TEMOINS, de Lucas Belvaux – 1h44
avec Yvan Attal, Sophie Quinton, Nicole Garcia, Natacha Régnier
Sortie : mercredi 14 mars 2012
Je vote : 3 sur 5

Le sujet ? De retour d’un voyage en Chine, Louise découvre que la rue de son appartement au centre du Havre a été le théâtre du meurtre d’une jeune étudiante. Personne n’a rien vu car, tous les voisins disent qu’ils dormaient.
Pilote au port, Pierre, son mari était lui parti en mer pour diriger la manœuvre d’un porte-conteneurs. Police et presse enquêtent. Une nuit Louise rêve que Pierre lui parle en dormant et confie sa présence dans leur appartement la nuit du meurtre…
Et alors ? Lucas Belvaux sait tricoter une atmosphère étouffante à souhait et dans ce récit sur la lâcheté du groupe, le veulerie de certaines gens, il fait un sans faute. Par petites touches, dans un univers où les couleurs sombres dominent, il parvient à rendre cette rue du Havre, étouffante à souhait. Un décor où les gens semblent étouffer sous le poids de leur mensonge. Il y a du Simenon dans cette atmosphère de ville de province qui vit comme au ralenti et le spectateur est vraiment pris par ce climat.

La faute aussi aux acteurs qui sont parfaitement à leur place. On sent que, comédien lui-même, le réalisateur sait diriger les siens. En marin taiseux, d’autant plus silencieux qu’il a honte de n’avoir rien dit au moment où il aurait fallu, Yvan Attal est parfaitement à sa place. On retrouve ce jeu qui faisait toute sa puissance dans Rapt, le précédent film de Belvaux. Face à lui, Sophie Quinton campe parfaitement une amoureuse désemparée mais qui, d’un sourire, peut illuminer une scène. Quant à Nicole Garcia, elle surprend dans la peau de cette enquêtrice qui n’hésite pas à se glisser partout pour les besoins de l’enquête, quitte à secouer le cocotier de l’administration.
Enfin, le metteur en scène joue très bien du cadre maritime d’une ville aussi austère que le Havre, reconstruite rapidement après les ravages de 39-45. L’océan semble ici jouer les révélateurs, le lieu où la parole peut enfin se dire. Et les séquences nocturnes au milieu du ballet des conteneurs que l’on décharge à la chaîne offre de vrais moments de poésie tout en distillant une atmosphère parfois menaçante.
En donnant juste à voir la lâcheté -la séquence de la reconstitution du meurtre est tout à fait exemplaire à ce sujet- Lucas Belvaux signe un récit oppressant et prenant sur la condition humaine.

