De fait, le coffret propose les trois versions du film proposées en copies restaurées : celle de 1979 et non expurgée des séquences hard; le montage italien de 1984, Io, Caligula, du neveu de Rosselini, le coproducteur Franco Rosselini et enfin la version de 2023, The Ultimate Cut. Le tout accompagné de très nombreux bonus et d’un livre signé des critiques Julien Sévéon et Olivier Rossignot. On découvre par exemple que Roberto Rosselini avait envisagé de le tourner et de camper lui-même Tibère avant de renoncer car les relations incestueuses entre Caligula et sa sœur Drusilla étaient bien trop sulfureuses.
Entre la première et la dernière version, on mesure à quel point ce Caligula était ambitieux avant d’être saucissonné à la mode porno. La distribution reste éblouissante et huit ans après Orange mécanique, Malcolm McDowell y fait une composition à sa démesure avec des temps forts comme la séquence de danse au bord de la piscine où il ressemble à un automate animé. Quant à Peter O’Toole, visage marqué, il symbolise à lui tout seul la déliquescence du politique. Et l’on surpris de découvrir Helen Mirren, légèrement vêtue, camper avec fougue Drusilla, la sœur de l’empereur décadent et sanguinaire. Film de la démure, ce Caligula bénéficia d’un budget colossal (près de 22 millions de dollars) et de la présence de 2500 comédiens, pour près de 3600 costumes créés, dont 26 pour le seul empereur. Quant aux décors, très surprenants, ils sont signés Danilo Donati, fidèle collaborateur de Federico Fellini.
Et avec le coffret, on voit bien où aurait conduit l’idée originale sur l’ascension et la décomposition morale d’un empereur aveuglé par le pouvoir et qui, après la mort de Drusilla, termine son règne dans le choc des images de marbre détruites à grands coups de marteau. Une vision politique sombre à cent coudées du porno baroque aimé par Guccione. Entre la première version et l’Ultimate Cut, qui lisse un peu trop la version de départ (en supprimant la belle bande originale de Bruno Nicolai) et une forme d’anarchie visuelle de Tinto Brass, il y aurait sans doute place pour une nouvelle approche de ce film maudit. La légende autour de ce Caligula a tout pour perdurer…
