La violence d’une société dominée par les hommes

Dans chacun des films, Marleen Gorris montre une société patriarcale qui doit regarder en face le destin de ces femmes brisées. Dans Le Silence autour de Christine M. , on le vit à travers le quotidien de femmes qui ne se connaissaient pas et réunies autour d’un meurtre d’une rare violence. En prime, l’une des protagonistes est la psychologue expert mandatée par la société et le procureur pour déterminer si les trois « tueuses » sont folles ou pas, étude rendue encore plus difficile que l’une d’entre elles ne dit pas un mot. Quand éclate la séquence inattendue du fou rire, elle symbolise une forme de révolte face à cette société dominée par les hommes, leur bon vouloir. Comme s’il valait mieux la provoquer par le rire que d’en pleurer !

Dans Miroirs brisés, derrière le reflet d’une maison de passe connue de tous et faisant montre d’un certain cachet, elle montre la misère sexuelle et affective de ces hommes qui passent, stigmatisant la violence quotidienne d’une société où évolue, en toute respectabilité, un psychopathe, en apparence bien sous tout rapport. Lieu clos par excellence – les rares sorties plongent le spectateur dans d’autres endroits confinés (la maison du drogué ou la cave du psychopathe- la maison close devient le théâtre d’une autre révolution féministe, plus collective cette fois.

Dénonçant sans signer un lourd pamphlet, Marleen Gorris a un vrai talent pour décrire ces quotidiens brisés, cette lutte des sexes qui est aussi celle des classes : de fait le psychopathe occupe de hautes fonctions et certains clients du bordel sont de bons bourgeois qui disent leur mélancolie d’une autre époque où l’on pouvait se confier à ces « dames ».

En regardant les deux films, on peut aussi établir des parallèles par le truchement des comédiennes. Ainsi, Edda Barends qui joue la femme silencieuse du premier film devient la captive martyrisée dans Miroirs brisés. Quant à Henriëtte Tol, tout à fait extraordinaire, elle est une des prostitués fortes de ce film quand elle jouait dans Le Silence autour de Christine M. la secrétaire policée qui finit par se prostituer dans raison évidente après le meurtre du boutiquier.

Deux films dérangeants qui n’ont pas pris une ride et conservent, malheureusement, une grande partie de leur actualité.

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