FREEDOM, de Rodd Rathjen – 1h32
Avec Sarm Heng, Thanawut Kasro, Mony Ros
Sortie : mercredi 27 novembre 2019
Mon avis : 4 sur 5
Le pitch ?
Dans la campagne cambodgienne, Chakra, 14 ans, travaille dans la rizière avec sa famille. Aspirant à plus d’indépendance, il sollicite un passeur pour trouver un emploi rémunéré dans une usine en Thaïlande. Il file à Bangkok dans l’espoir de mieux gagner sa vie.
En arrivant sur place, Chakra et son nouvel ami Kea, âgé d’une trentaine d’années, découvrent que l’intermédiaire leur a menti : comme d’autres Cambodgiens et Birmans, ils sont vendus comme esclaves à un capitaine de chalutier…
Ce qui touche dans ce film ?
Parlant de la genèse du scénario de son premier long métrage, Rodd Rathjen raconte : « Il y a quelques années, je suis tombé sur un article au sujet des conditions de vie à bord d’un chalutier thaïlandais : celui-ci adoptait le point de vue des pêcheurs cambodgiens qui en composaient l’équipage – j’ai eu du mal à croire qu’une telle abomination était possible. Plus j’approfondissais mes recherches, plus cet univers et ses personnages devenaient palpables. L’ampleur de l’esclavage moderne et de l’exploitation humaine en Thaïlande est considérable et difficile à estimer. Depuis, j’ai interviewé beaucoup de rescapés qui ont miraculeusement réussi à regagner le Cambodge ou qui ont trouvé refuge en Thaïlande dans un état d’abrutissement total. Ce projet s’inspire des témoignages de survie de ces hommes courageux, qui m’ont fait part de leur histoire. »
En faisant appel en majorité à des non professionnels qui donnent un réalisme étonnant à ce conte cruel de la mer – certaines séquences sont insoutenables comme celle où un marin révolté est exécuté – Rodd Rathjen nous montre l’envers du décor et la vie de ces forçats du golfe de Siam qui vivent une existence des plus sordides.Nourriture minimale, conditions de vie d’une extrême dureté et servage : Freedom montre bien le quotidien de ces laissés-pour-compte perdus en mer sous l’autorité de patron qui ont, eux-mêmes parfois, survécu à une telle condition et fait ses classes de violence.
Jouant aussi bien sur des plans larges qui donnent à voir l’isolement de ce chalutier sur les flots que des plans serrés dans l’entrepont où survivent ces bagnards modernes, Rodd Rathjen nous embarque dans ce voyage de la perte d’une innocence où le jeune Chakra (l’étonnant Sarm Heng) ne pourra survivre qu’en cédant, lui-aussi, à la violence avant de tenter de survivre dans un univers si hostile aux pauvres. Comédien, lui, depuis son plus jeune âge, il explique le sens de son engagement dans un tel film : « Je pense que ce film est important parce qu’il dévoile la vraie vie des Cambodgiens. » Et il se réjouit que le film soit projeté au Cambodge pour que « d’autres jeunes filles et jeunes garçons ne tombent pas dans le piège et n’aient pas à vivre ce que subit Chakra.»
Violent, dérangeant, Freedom est un film courageux et qui aborde un thème vraiment inédit au cinéma.

