L’AMOUR LOIN DES CASTES

MONSIEUR, de Rohenna Gera – 1h39

Avec Tillotama Shome, Vivek Gomber, Geetanjali Kulkarni

Sortie : mercredi 26 décembre 2018

Mon avis : 3 sur 5

Le pitch ?

Ratna est domestique chez Ashwin, le fils d’une riche famille de Mumbai.
En apparence la vie du jeune homme semble parfaite, pourtant il est perdu. Ratna sent qu’il a renoncé à ses rêves. Elle, elle n’a rien, mais ses espoirs et sa détermination la guident obstinément. Deux mondes que tout oppose vont cohabiter, se découvrir, s’effleurer…

2 raisons d’aller voir ce film ?

Une description de la fracture des classes en Inde. Même si Bombay est une ville très moderne, la séparation entre les castes reste très vivace dans l’Inde moderne comme le montre  l’histoire des relations entre ce maître, très occidentalisé après son séjour aux États-Unis, et sa bonne, une jeune veuve venue des campagnes et qui s’occupe avec attention de ce patron dévasté par la récente annulation de son mariage. Rohenna Gera souligne : « Les domestiques en Inde, encore aujourd’hui, ne s’assoient pas dans les mêmes fauteuils que les personnes pour lesquelles ils travaillent. Ils n’utilisent pas le même verre pour boire de l’eau… Il existe une séparation pour tout. »

Par la séquence où Ratna déjeune dans la cuisine à même le sol,  après la party organisée chez la mère de Ashwin, on mesure bien la fracture de la société indienne. Elle s’exprime aussi  dans les relations de la jeune veuve et du tailleur chez qui elle se rend pour se former.

Dans ce contexte, le récit, finement mené, d’un « amour qui transcende les normes sociales » donne à voir, par petites touches, les tabous qui parcourent la société indienne.

Deux acteurs bien dans le tempo. D’abord, il y a Tillotama Shome qui campe la jeune bonne avec une grande retenue et que la cinéaste avait repérée dans Le Mariage des moussons, de Mira Nair. Son visage parvient à exprimer une grande palette d’émotions sans que jamais elle ne paraisse naïve ou stupide. Ce n’est pas Bécassine à Bombay, bien au contraire ! « Ratna dévoile les facettes de sa personnalité, comme autant de pièces d’un puzzle » ajoute Rohenna Gera. Par moment, elle laisse éclater, avec un beau sourire, son amour de la vie comme dans la séquence de danse lors de la fête de Ganesh. Un moment où Ratna semble laisse percer les sentiments qui l’animent.

Face à elle, Vivek Gomber joue extrêmement bien, un homme prisonnier des conventions mais qui prend, finalement,  bien des risques pour s’en libérer sans pour autant étaler sa fortune. On sent chez lui une vraie générosité, une vraie ouverture d’esprit. La manière dont la cinéaste filme le couple qui se croise sans jamais se toucher, dans un étrange ballet social, permet au comédien de jouer sur bien des nuances.

Beau film sur une histoire d’émancipation féminine, Monsieur est aussi le récit de l’éclosion d’un tempérament d’artiste à travers cette jeune femme qui rêve aussi de devenir une vraie styliste.

 

Laisser un commentaire