AVANT L’AURORE, de Nathan Nicholovitch – 1h45
Avec David D’Ingéo, Panna Nat, Ucoc Lai
Sortie : mercredi 19 septembre 2018
Mon avis : 2 sur 5
Le pitch ?
Mirinda, un Français prostitué, vit au jour le jour dans les faubourgs de Phnom Penh. Une existence faite d’excès et d’espoir, dans une ville toujours marquée par son passé Khmer rouge. Sa rencontre avec Panna, une petite fille livrée à elle-même, va bouleverser son équilibre et lui donner le courage de se transformer encore.
Et alors ?
Une chose est sûre à la fin du visionnage d’Avant l’aurore : on ne peut qu’être
impressionné par la performance de l’acteur principal David D’Ingéo, campant ce travesti déglingué qui gravite dans les bouges de la capitale du Cambodge et donne le spectacle de son voyage au bout de l’enfer. Car Phnom Penh vit – sans doute pour de longues années encore ! – avec la mémoire des crimes des khmers rouges. De manière fugace, le film l’évoque avec la belle séquence où Mirinda commente les photos du musée Tuol Sleng, ce lycée devenu centre de détention au cœur de la ville et qui porte témoignage du génocide perpétré par lesdits khmers entre 1975 et 1979. Tout comme, Nathan Nicholovitch sait filmer avec un réalisme terrible la prostitution qui touche toutes les couches de la société, notamment les pires exactions pédophiles.
Là où le film peut générer interrogation et malaise c’est dans l’absence d’information pour cadrer son récit. On a le sentiment qu’il veut surtout – et il le fait bien – montrer la fragilité de ses personnage, blessés par la vie, et qui pourrait, à l’instar de Mirinda, hanté par la chirurgie esthétique, lutter contre les outrages du temps et les blessures de la mémoire.
Il manque alors à son scénario un fil directeur, expliquant notamment le rôle de la jeune femme qui enquête sur les crimes commis durant la dictature des émules de Pol Pot alors même que le réalisateur ouvre certaines pistes. Bien sûr, il y a la belle histoire de la quête de salut de Mirinda avec la petite fille et de la volonté de fuir cet enfer, mais le récit finit par devenir répétitif, se préoccupe surtout des corps abimés – dans certaines séquences, David D’Ingéo fait penser à un Iggy Pop perdu sur les rivages orientaux – et des accidents de la vie.
Cela ne suffit pas à nous émouvoir et c’est dommage. Cela ne suffit pas non plus à éviter un certain voyeurisme à partir du moment où le spectateur ne perçoit pas vraiment la finalité d’une histoire qui se garde bien, par exemple, d’évoquer pourquoi Miranda a atterri dans ce pays, pourquoi le choix de la prostitution. La maîtrise -certaine – de la mise en scène de ce road movie initiatique paraît alors un brin gratuite.

