AMOUR ET LUTTE DE CLASSE

LA FILLE DU PATRON, d’Olivier Loustau – 1h38

Avec Christa Théret, Olivier Loustau, Florence Thomassin

Sortie : mercredi 6 janvier 2016

Je vote : 3 sur 5

lafilledupatron_03Quezako ?

Vital, 40 ans, travaille comme chef d’atelier dans une usine textile. Il est choisi comme « cobaye » par Alix, 25 ans, venue réaliser une étude ergonomique dans l’entreprise de son père sous couvert d’anonymat. La fille du patron est rapidement sous le charme de cet ouvrier réservé et secret qui s’ouvre peu à peu à son contact et qui  se met à rêver d’une autre vie…

Et alors ?

Un an après l’étonnant Discount, qu’il n’égale pas quand même,  ce film réussit avec finesse à lafilledupatron_02ausculter la société actuelle. Et le parti-pris de suivre la vie d’une petite PME du textile qui survit vaille que vaille à la crise n’est pas des moins intéressant. Et surtout, Olivier Loustau le fait sans sombrer dans le déjà-vu, une espèce de compassion mal venue. Il confie : « La Fille du patron » a plusieurs résonances avec ma propre histoire. Fils d’ouvrier, j’ai voulu situer l’action de mon premier film au cœur d’une usine et faire de cet univers industriel en déclin, le cadre d’une comédie sociale. Dès l’écriture, j’étais motivé par la question de représenter les classes populaires de manière vivante, sans pathos, ni misérabilisme. J’avais envie de montrer ces héros ordinaires, avec leurs forces et leurs faiblesses. »

Le scénario décrit l’histoire d’un amour qui se joue des classes, transgressif et qui provoque des dégâts aussi bien du côté de cette fille du patron – veuf, et ancien ouvrier, il considère que cet amour est une déchéance pour elle – que des ouvriers qui expriment vite leur colère, leur suspicion devant celui qui semble avoir, par amour, déserté leur rang.Ce film tord aussi le coup à une idée très répandue de la disparition totale d’une classe ouvrière, et de ses codes, dans la société française car, comme le souligne le réalisateur, elle représente toujours « 22% de la population active ! »

Une des bonnes surprises du scénario, c’est l’idée de faire passer lafilledupatron_04la lutte dans l’usine par le sport et le rugby, plutôt que par la grève. C’est tout un symbole d’ailleurs que cette manière de laisser la grève sur la bas-côté dans cette histoire.

Sous les codes du divertissement, La Fille du patron dit beaucoup sur notre société et les relations de force qui la traverse. Et le casting, bien pesé, donne une crédibilité certaine à l’ensemble. Il faut notamment évoquer la prestation de Patrick Descamps, très juste dans sa façon de camper ce petit patron qui se bat au côté des ouvriers pour faire survivre son entreprise. Et puis, Olivier Loustau a eu la main heureuse en faisant jouer de « vrais » ouvriers dans ce récit ce qui renforce la crédibilité de l’histoire. Il conclue : « D’une certaine façon, les acteurs non professionnels donnent le la et c’est aux professionnels de s’ajuster. Et non pas l’inverse. Je voulais créer un groupe hétéroclite, sans chercher à être exhaustif mais en essayant de refléter la réalité de la France telle que je la vois. »

 

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