LA COMÉDIE DE LA COURNEUVE

PAPA WAS NOT A ROLLING STONE, de Sylvie Ohayon – 1h39

avec Doria Achour, Aure Atika, Marc Lavoine, Soumaye Bocoum

Sortie : mercredi 8 octobre 2014

Je vote : sur 5

013122Quezako ?

Dans les années 80, Stéphanie grandit à La Courneuve auprès d’une mère absente et d’un beau-père brutal. Très vite, elle décide d’échapper à ce quotidien morose. Grâce à l’amour de sa grand-mère, à ses lectures, sa passion pour la danse et pour Jean-Jacques Goldman, elle se débat dans cette cité colorée où l’amitié est primordiale…

 

Et alors ?
Dépeindre la banlieue sans tomber dans le misérabilisme, ni la naïveté, c’est le pari gagné de Sylvie Ohayon qui a adapté ici son roman autobiographique, après avoir grandi à la Courneuve. « Je voudrais raconter la vie à La Courneuve
comme elle n’est jamais montrée à la télévision, ses murs massifs sous lesquels grouille la vie, ses barres en béton imprimées de sacrés souvenirs, évoquer la tchatche comme l’arme du rire qui désamorce la violence, les attitudes, la mixité culturelle, dire la solidarité, la tendresse, les douleurs silencieuses aussi, et exploiter ses lignes graphiques, rigoureuses _pap4128comme ses entremêlements vénéneux », souligne Sylvie Ohayon .

Ce qui touche indéniablement dans ce récit à tiroirs, c’est le rythme des dialogues qui claquent dans bien des séquences et dont l’humour permet de faire passer bien des messages. Notamment par le truchement de l’amie de Stéphanie – la pétulante Soumaye Bocoum – qui parle comme une mitraillette avec un sens consommé des images. Rien n’est masqué mais rien n’est surligné dans la vie de cette banlieue bien dégradée : le regard des communautés qui peut tourner à l’agressif, le  poids des traditions respectives,  la promiscuité, les trafics en tout genre… Mais le ton, l’humour, même noir, bien dosé fait passer bien des messages.

Le tout est porté par un casting solide – Doria Achour est une jeune actrice avec laquelle il va falloir sûrement compter tant _pap3099elle sait jouer sur plusieurs registres  – et qui surprend parfois. Ainsi Marc Lavoine campe le beau-père violent et raciste, un vrai contre-emploi pour l’acteur-chanteur d’ordinaire plus séducteur. C’est le salaud parfait qui pointe un doigt accusateur sur le poster de la star de sa femme et de sa belle fille – Jean-Jacques Goldman – en lançant « Toi, le juif, ça gaze !  » Dans un autre registre, le rendez-vous de Stéphanie avec la conseillère d’éducation est une séquence d’une grande drôlerie qui en dit long sur les difficultés de penser l’éducation aujourd’hui.

Là où le film patine un peu, c’est dans la romance sentimentale entre Stéphanie et son petit copain beur, même s’il y a des moments justes comme la première fois où il passe à l’acte. Dans la dernière partie du film, le scénario a un peu de mal à rebondir alors que le spectateur se doute un brin de l’issue de l’aventure de Stéphanie. Enfin, là où Sylvie Ohayon rame un peu et ne parvient pas à échapper à la caricature, c’est dans la description de la famille paysanne du beau-père.

Malgré ces imperfections, ce film est une vraie bouffée d’air pur et de drôlerie. Un peu à la manière de L’Esquive, c’est aussi un beau plaidoyer pour l’école, comme moyen de « s’envoler ».

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