ELLE L’ADORE, de Jeanne Henry – 1h44
avec Sandrine Kiberlain, Laurent Laffitte, Pascal Demolon, Olma Côte
Sortie : mercredi 24 septembre 2014
3 sur 5
Muriel est esthéticienne, bavarde, qui aime raconter des histoires souvent farfelues. Depuis vingt ans, elle est aussi la première fan du chanteur à succès Vincent Lacroix. Lorsqu’une nuit Vincent, son idole, sonne à la porte de Muriel, sa vie bascule. Elle est entrainée dans une histoire qu’elle n’aurait pas osé inventer quand elle accepte de le débarrasser d’un encombrant colis.
Et alors ?
Avec la description de la relation névrotique entre une fan, en apparence nunuche, et une star qui pourrait être un mélange de Patrick Bruel, Julien Clerc et Michel Berger, côté notoriété – Jeanne Herry signe une comédie policière décalée où se mêlent la description du fanatisme de la fan à un récit policier. « Les fans et les chanteurs sont des figures, ils charrient beaucoup de clichés. Moi qui ai vécu à une place privilégiée pour observer tout cela, j’ai vite su que mon histoire serait basée sur la banalité des gens connus et sur l’originalité des gens banals… Muriel a en effet un vrai univers : ce n’est pas
de la folie au sens clinique, (ça ne m’aurait pas du tout intéressé d’ailleurs), elle n’est pas hystérique, pas dangereuse pour Vincent. Elle a juste cette petite fêlure, cette peur du vide, que je voulais explorer… » souligne Jeanne Herry (ci-contre sur le tournage) qui, fille de Julien Clerc et de Miou Miou, connaît le système de près.
Dans cette description d’une groupie névrosée, la cinéaste réussit son coup tant le duo formé par Laurent Laffitte – un monstre d’égoïsme – et cette fan est bien vue et nourrie de dialogues qui font mouche. Ainsi quand Vincent Lacroix lance aux enquêteurs qui auscultent sa relation avec Muriel d’un ton glacial : « Ce n’est rien, c’est juste une fan. » Narcissique à souhait dans ce rôle, Laurent Laffitte note : « Il veut à tout prix sauver tout ce qu’il a mis en place depuis le début de sa carrière et c’est là où le fait qu’il s’agisse d’un chanteur très connu n’est pas juste anecdotique. À partir de cet instant, son ego prend le dessus mais aussi « l’entreprise » Lacroix et tout ce qu’elle représente. » Côté réalisation, Jeanne Herry a trouvé une manière originale de filmer Vincent Lacroix sur scène sans jamais le faire… entendre.
Une fois encore, Sandrine Kiberlain prouve à quel point elle peut changer de registre et signer des compositions épatantes. Dans la peau de Muriel, elle donne une vraie épaisseur à cette jeune femme qui rêve sa vie pour échapper sans doute à une existence morne d’esthéticienne divorcée et dont les enfants commencent à lui échapper. Elle dit : »Muriel a ce don de rendre tout ce qu’elle invente plus évident et simple que l’histoire réelle ! Dès le début du film, on sait et on voit que Muriel
a une imagination débordante : elle invente des choses pour ses enfants ou ses amis quand elle leur raconte les façons d’épiler ses clientes ou qui vient au salon. C’est sans doute une façon de lutter contre l’ennui et encore une fois d’embellir son quotidien… »
La partie la moins réussie de l’opus, c’est l’enquête policière dont les ficelles sont un peu grosses pour nous prendre dans ses filets. Et qui est un brin caricaturale avec la description des relations hiérarchiques, les histoires amoureuses d’un soir… Alors que le portrait d’une menteuse professionnelle est original à souhait, l’intrigue policière manque singulièrement de souffle et donne un final qui manque de peps. Mais, le talent des deux comédiens permet de sauver la mise quand même en offrant cette sympathique comédie.

