UNE MERE QUI PLONGE

A PERDRE LA RAISON, de Joachim Lafosse, 1h51

Avec Niels Arestrup, Emilie Dequenne, Tahar Rahim

Un couple dans la tempête (Emilie Dequenne et Tahar Rahim)

Sortie : mercredi 22 août 2012

Mon avis : 4 sur 5

Quezako ?  Depuis son enfance, Mounir vit confortablement chez le Docteur Pinget. Un jour, il tombe amoureux de Murielle et ils  décident de se marier et d’avoir des enfants. Le docteur leur  propose de partager son toit. Mais, rapidement, le médecin devient très envahissant dans leur vie. Prisonnière de ce climat familial oppressant, Murielle  va de déprime en déprime. Un climat propice à tous les drames.

Trois raisons d’aller voir ce film ?

Un thème universel et fort : l’infanticide. Emilie Dequenne souligne : « C’est une tragédie immense, forte et un rôle que je ne pouvais ni rater ni refuser même s’il me faisait peur avoue-t-elle. En temps que mère de famille, ce rôle est interpellant, me fait écho et résonne. On fait le lien sans en faire. Je devais donc amener cette réalité de moi sans me laisser bouffer par la psychose de Murielle. Car cette femme est clairement malade. Elle souffre d’une véritable psychose dont les accouchements ont été le déclencheur. Un personnage tellement tourmenté que j’en ai longuement parlé avec un psychiatre ».« 

Joachim Lafosse s’est inspiré d’un fait divers survenu en 2007 pour nourrir son scénario mais en se refusant à tout sensationnalisme. Par sa manière pudique et profonde d’aborder un tel sujet, il en fait une histoire universelle. Il dit : « J’ai pensé tout de suite que cela renvoyait à la tragédie antique, et que ce fait divers m’offrait la possibilité d’approfondir ce dont je parlais dans mes films précédents : le trop plein d’amour, ses conséquences, la dette, le lien pervers, les dysfonctionnements familiaux, la question des limites…« 

Une réflexion sur la bonne conscience. Névrosé à sa façon, sans que le cinéaste ne cherche à tout expliquer clairement de sa psychologie, le docteur Pinget symbolise une forme de comportement occidental face à un immigré nord-africain. Dans ses relations avec Mounir et sa jeune femme, il incarne un peu une assurance vie dans un type de relation complètement perverse où la bienveillance apparente masque parfois une violence qui peut surgir à tout moment. A cet égard, la prestation de Niels Arestrup se passe de tout commentaires. Son regard d’un bleu qui transperce est capable de faire passer tous les registres des émotions.

Un docteur qui veut tout régir (Niels Arestrup) et son protégé (Tahar Rahim)

Des acteurs parfaits. Face à lui, et Tahar Rahim, excellent dans ce rôle de mari efface, un brin veule, Emilie Dequenne est éblouissante dans le rôle de cette jeune femme perdue, définie par le cinéaste comme « dépassée, épuisée, maltraitée, en proie au doute, à la peur, et qui craque. » Aussi juste dans le rôle de cette mère dévouée que dans celui d’une femme au bord de la crise de nerfs en permanence, elle est émouvante de bout en bout. Avec la séquence forte de la voiture où, tout en conduisant, elle est prise d’une crise de sanglots en écoutant un tube de Julien Clerc.  Son prix d’interprétation féminine dans la catégorie Un certain regard à Cannes est plus que mérité tant la comédienne porte le film de bout en bout en exprimant toutes les palettes des émotions.

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